RDC : Mukwege dénonce la non-adoption de la Politique nationale de justice transitionnelle, 14 ans après le rapport Mapping

IMG
Fervent partisan d’une justice transitionnelle face aux atrocités subies par des Congolais lors de deux guerres du Congo, le prix Nobel de la paix 2018, Denis Mukwege s’est montré inquiet après avoir constaté l’absence d’évolution de cet aspect au niveau du gouvernement. Pire, ce volet de justice n’est pas pris en compte par le gouvernement Suminwa.

Dans un message intitulé « Rapport Mapping 14 ans », le célèbre gynécologue de l’hôpital de Panzi a exprimé des vives "inquiétudes" face au manque d’évolution de l'agenda relatif à la justice transitionnelle en République démocratique du Congo. Alors que le président de la République, Félix Tshisekedi, avait promis, en 2020, de placer cette politique de justice transitionnelle dans le programme du gouvernement, force est de constater que ce dossier n’a pas évolué à la sixième année de sa présence au pouvoir.

« Alors que le Président Félix Tshisekedi avait suscité l’espoir en 2020 suite à l’expression d’une volonté politique de placer la justice transitionnelle à l’agenda du gouvernement lors de son premier mandat, force est de constater que seul un mécanisme non judiciaire, le Fonds national de réparations – le FONAREV –  a été installé sous l’égide du Bureau de la Première Dame, mais n’est pas encore opérationnel et effectif, ce qui engendre beaucoup de déceptions dans le chef des victimes », a déclaré Denis Mukwege.

Le prix Nobel de la paix note que malgré le lancement d’un processus de consultation populaire sur la justice transitionnelle sous l’impulsion du ministre des Droits humains en 2022 et la mise en place d’un Comité scientifique chargé de l’élaboration du projet de politique nationale de justice transitionnelle en RDC, cette politique n’a toujours pas été adoptée, 14 ans après la publication du rapport par les Nations unies.

Ce qui est plus inquiétant, c’est que la question n’a même pas été prise en charge dans le programme d'actions du gouvernement de la Première ministre, Judith Suminwa. Ce qui, selon lui, démontre l'absence de volonté politique pour faire avancer cette question.

« Nous déplorons que le programme d’actions du gouvernement pour 2024-2028 ne contienne qu’une mention cosmétique à la justice transitionnelle, ce qui démontre qu’il n’y a pas une réelle volonté politique du régime en place pour faire avancer la justice transitionnelle en RDC, ce qui est très regrettable lorsque l’on sait que l’impunité pour les crimes du passé alimente la répétition des atrocités jusqu’à a ce jour », a dénoncé Denis Mukwege.

Depuis plusieurs années, Denis Mukwege se bat pour la mise en application des recommandations du Rapport Mapping du Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l’homme. Ce projet de rapport, publié en 2010, comporte 581 pages dans sa version française, et contient un inventaire de 617 violences et crimes avérés commis par des groupes rebelles de l’époque, notamment le Rassemblement des Congolais pour la démocratie (RCD).

Ce rapport contient un recensement des violations les plus graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire, suivi d'une évaluation du fonctionnement du système judiciaire congolais. Il y a aussi une série de recommandations en vue de traiter la question de l'impunité des criminels de guerre dans le pays, notamment au travers de la mise en place de mécanismes de justice transitionnelle. C’est ce combat que mène ce célèbre gynécologue congolais depuis plus de 10 ans. Ayant été aux côtés des victimes depuis la commission de ces atrocités, Denis Mukwege partage le souci de voir ces femmes violées et d’autres victimes de ces conflits armés bénéficier d’une justice.

En attendant son aboutissement, le prix Nobel de la paix a créé, via la Fondation Panzi, des centres communautaires dans les territoires de Walungu, Mwenga et la province du Kasaï Central pour encadrer les survivantes de ces violences. Un dernier centre vient d’être inauguré, le 30 septembre dernier, dans l’aire de santé de Bulenga, dans le territoire de Kalehe, dans la zone de santé de Minova, au Sud-Kivu. Ces survivantes apprennent des métiers tels que la savonnerie, la pâtisserie, la coupe couture ou encore la vannerie.

Dido Nsapu


(DN/PKF)


03-Octobre-2024

COMMENTAIRE(S)

Laisser un commentaire